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IFRI : Comprendre le risque géopolitique pour les entreprises, avec Thomas Gomart

Ce mois-ci, notre rencontre nous mène à Thomas Gomart, directeur de l’IFRI, et Siméo Pont, expert au sein du même institut. À la suite de leur publication « La fabrique du risque – Les entreprises face à la doxa géopolitique », ils partagent un constat sans détour : la géopolitique n’est plus un bruit de fond. Elle s’impose désormais comme un paramètre central de la stratégie d’entreprise, au même titre que la croissance ou la gestion des talents.

Face à une instabilité mondiale croissante, ils nous invitent à repenser en profondeur la manière dont les entreprises perçoivent – et surtout intègrent – le risque géopolitique.

1. Le contexte : vers une nouvelle grammaire géopolitique

Ils expliquent que depuis la publication en 2016 de « Le retour du risque géopolitique » par Thomas Gomart, la dynamique mondiale a profondément évolué. L’intensification des tensions au sein du triangle stratégique Russie–Chine–États-Unis bouleverse les repères hérités de la mondialisation heureuse.

Le monde de l’entreprise, longtemps convaincu que l’économie primerait toujours sur les logiques étatiques, doit désormais composer avec une réalité inversée : la géopolitique peut prendre le dessus sur l’économique.

Ce changement impose un véritable virage stratégique. Comme l’explique Siméo Pont : « Nous ne sommes plus en pilotage automatique. Il faut revenir à une conduite manuelle. »

Les entreprises doivent donc apprendre à lire les dynamiques géopolitiques comme elles scrutent les marchés : avec rigueur, méthode, et vigilance.

2. Les erreurs fréquentes des entreprises face au risque géopolitique

Malgré une prise de conscience croissante, les experts insistent sur le fait que plusieurs erreurs continuent de freiner l’intégration effective du risque géopolitique dans les stratégies d’entreprise :

  • Confondre risque pays et risque géopolitique : En effet, ils expliquent que le risque pays évalue principalement la solvabilité d’un État et la stabilité politique interne. Le risque géopolitique, lui, englobe les interactions systémiques entre États, les jeux de puissance et les tensions interétatiques. C’est une erreur de penser qu’un pays stable à l’intérieur est à l’abri des turbulences extérieures.
  • Croire que seules les grandes entreprises sont concernées : Start-ups, PME ou ETI sont aussi vulnérables. « Même une petite entreprise dont la chaîne d’approvisionnement dépend d’un acteur inséré dans une logique globale est exposée », rappelle l’expert.
  • Les scénarios rigides sont des pièges :Les auteurs de l’étude expliquent que la crise survient précisément lorsque les scénarios d’anticipation sont dépassés. Penser que l’on peut modéliser à l’avance tous les cas de figure est illusoire. Ils affirment qu’il faut faire vivre les scénarios, les ajuster continuellement en fonction de l’évolution du contexte international.

3. Recommandations : vers une culture de la vigilance stratégique

Alors, comment faire concrètement ? Gomart et Pont formulent plusieurs recommandations claires pour aider les entreprises à intégrer durablement la géopolitique dans leur gouvernance :

  • Incarner la vigilance au plus haut niveau : Le COMEX et les dirigeants doivent être formés, sensibilisés et moteurs de cette transformation. La géopolitique ne doit pas être cantonnée à un rapport annuel ou à une mission ponctuelle. Elle doit infuser chaque décision stratégique.
  • Adapter les analyses à la singularité de l’entreprise : Chaque organisation possède une géographie propre, une histoire, une sensibilité aux risques qui lui est spécifique. « Il n’existe pas de matrice unique » indique M. Pont. Il faut une lecture incarnée de la géopolitique, intégrée au profil de risque de chaque entreprise.
  • Croiser les sources : Les analyses gratuites et publiques (produites par des think tanks ou des cabinets) sont utiles, mais doivent être enrichies par des lectures académiques, historiques, et une compréhension fine des intentions des acteurs étatiques.
  • Faire évoluer en permanence les scénarios de crise : Plutôt que de planifier une fois par an des “pires scénarios”, il est essentiel d’adopter une approche dynamique. Cela signifie confronter régulièrement ses hypothèses à l’évolution des rapports de force mondiaux.
  • Intégrer la géopolitique comme un levier de transformation, pas comme une contrainte : Ce n’est pas uniquement une gestion défensive. Comprendre les risques géopolitiques, c’est aussi anticiper des opportunités, repositionner ses marchés, réallouer ses investissements, et se préparer à jouer la bonne note dans une partition devenue chaotique.

À retenir :

« Nous ne sommes plus en pilotage automatique »

La géopolitique impose un retour à une lecture active du monde. Ne pas anticiper, c’est subir. La vigilance stratégique doit redevenir une fonction vitale de l’entreprise.

« La crise intervient précisément quand les scénarios d’anticipation sont dépassés »

Les plans figés ne protègent pas. Ce qui compte, c’est la capacité à ajuster ses scénarios en temps réel, à interroger ses hypothèses, et à se préparer à l’inattendu.

La géopolitique n’est pas une contrainte, c’est un levier de transformation

Comprendre les risques géopolitiques, c’est aussi anticiper des opportunités, repositionner ses marchés, réallouer ses investissements et se préparer à jouer la bonne note dans une partition devenue chaotique.

Le temps des alliés : bâtir son influence avant que tout s’enflamme.

Au-delà d’éteindre le feu

Dans un environnement économique et politique en constante évolution, les entreprises font face à des crises aux causes variées : réglementaires, sociales, environnementales, réputationnelles… La gestion efficace de ces situations ne repose plus uniquement sur la communication de crise, mais nécessite une intégration stratégique des affaires publiques. En établissant des relations solides avec les parties prenantes et en anticipant les crises potentielles, les entreprises peuvent non seulement atténuer leurs impacts, mais aussi en sortir renforcées.

Avant que la crise n’éclate : des entreprises qui avaient un coup d’avance

  1. LVMH : Réorientation rapide de la production pour répondre à la crise sanitaire

Contexte de la crise : En mars 2020, alors que la pandémie de COVID-19 plonge la France dans une crise sanitaire sans précédent, une pénurie critique de gel hydroalcoolique frappe les hôpitaux. Comme toutes les entreprises, LVMH est impacté par l’arrêt brutal de nombreuses activités. Mais au lieu de subir, le groupe trouve un moyen d’agir.

Réponse stratégique : En 72 heures seulement, LVMH réoriente plusieurs de ses lignes de production de parfums (Christian Dior, Guerlain, Givenchy) pour produire du gel hydroalcoolique. Un geste rapide, coordonné, et à forte portée symbolique, dans un secteur pourtant éloigné de la santé.

Rôle des affaires publiques : Cette réactivité a été rendue possible par les relations établies en amont avec les autorités sanitaires françaises. Grâce à ces liens de confiance préexistants, LVMH a pu entrer immédiatement en contact avec les bons interlocuteurs, obtenir les autorisations nécessaires, et s’inscrire en soutien direct à la stratégie nationale de réponse à la crise.

Résultat : Le groupe a fourni gratuitement des milliers de litres de gel aux hôpitaux français, renforçant son image d’entreprise responsable et démontrant qu’une crise bien gérée peut devenir une opportunité d’engagement et de valorisation.

  • TotalEnergies : Intégration des affaires publiques dans la transition énergétique

Contexte de la crise : Sous la pression croissante des enjeux climatiques, des mouvements sociaux, des ONG et des nouvelles réglementations européennes, TotalEnergies fait face à une remise en question profonde de son modèle économique basé historiquement sur les énergies fossiles. Pour maintenir sa légitimité et son attractivité, l’entreprise doit engager une mutation stratégique rapide, tout en évitant une crise réputationnelle.

Réponse stratégique : TotalEnergies amorce un virage vers un modèle énergétique plus durable, en investissant massivement dans les énergies renouvelables, les biocarburants et l’hydrogène. Elle rebaptise même son identité de marque en 2021, affirmant publiquement son engagement vers la neutralité carbone et la diversification de ses activités.

Rôle des affaires publiques : Cette transition ne repose pas uniquement sur des choix technologiques ou économiques. Elle s’appuie sur une stratégie d’affaires publiques intégrée, reposant sur un dialogue structuré avec les régulateurs français et européens et une veilleréglementaire active, pour anticiper les futures contraintes environnementales. 

Résultat : TotalEnergies parvient à aligner sa stratégie avec les objectifs climatiques, tout en maintenant sa position sur le marché énergétique mondial.

  • Sanofi à l’écoute : Garder un coup d’avance grâce à la veille réglementaire

Contexte de la crise potentielle : Sanofi, acteur majeur du secteur pharmaceutique, évolue dans un environnement hautement réglementé, soumis à des changements fréquents des législations nationales et européennes, notamment en matière de sécurité sanitaire, d’étiquetage, d’essais cliniques, ou encore de mise sur le marché des médicaments.

Réponse stratégique : Consciente des enjeux de conformité et des risques financiers et réputationnels liés à la non-anticipation réglementaire, Sanofi a mis en place une veille robuste et centralisée. L’entreprise surveille activement les publications et  les textes de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), de l’EMA (Agence européenne des médicaments) et de la FDA (États-Unis).

Rôle dans la prévention de crise : Ce dispositif est étroitement articulé avec les fonctions d’affaires publiques de l’entreprise, qui assurent un dialogue continu avec les autorités de santé. Ce lien direct avec les institutions permet de mieux comprendre l’agenda réglementaire à venir, de faire remonter des points de vigilance et de préparer des ajustements internes de manière proactive.

Résultat : La veille de Sanofi constitue un levier stratégique. Elle permet non seulement d’assurer la conformité réglementaire continue, mais aussi de positionner Sanofi comme un acteur fiable, proactif et crédible auprès des régulateurs, des partenaires institutionnels et du public. Cela renforce sa capacité à gérer les crises réglementaires potentielles et à maintenir sa licence d’exploitation sur tous ses marchés.

Les bons réflexes à adopter :

  1. Établir des relations solides avec les parties prenantes en amont d’une crise, notamment avec les autorités, les ONG et les relais d’opinion, afin d’anticiper les attentes, fluidifier les échanges en situation sensible et renforcer la légitimité de l’entreprise lorsqu’une crise survient.
  2. Intégrer les affaires publiques dans la stratégie globale pour sécuriser les investissements, faire entendre sa voix dans les débats réglementaires, et anticiper les impacts politiques ou sociétaux.
  3. Mettre en place une veille réglementaire efficace afin de détecter les signaux faibles, s’adapter rapidement aux évolutions législatives, et garantir une conformité continue sur tous les marchés.

President Trump’s Visit to Saudi Arabia: Key Takeaways & Analysis

Overview
President Trump arrived in Saudi Arabia this may to an elaborate welcome, including a personal tarmac greeting from Crown Prince Mohammed bin Salman (MBS) — a clear display of the Kingdom’s highest respect. His visit was positively received by Saudi leadership and an excited local public, who viewed it as a vote of confidence for Saudi Arabia’s transformation, its economic and political model, and its growing role on the global stage. For President Trump, it was another opportunity to stray away from American political tradition (first, by the very choice of Saudi Arabia as a destination over more traditional allies in Europe and North America), and double down on his interests-first, transactional approach to foreign policy.

The visit was centered on bringing home business deals, standing in sharp contrast to former President Joe Biden’s 2022 visit, a tense affair following Biden’s characterization of the Kingdom as a “pariah.” Headline announcements during the trip focused on economic agreements from leading U.S. companies in energy, defense, and technology, totaling $283 billion, a number which falls short of the widely touted $600 billion. Most importantly, the deals signal clear encouragement from the White House to the U.S. business community to actively expand commercial cooperation with KSA.

This article summarizes additional key takeaways and strategic implications from President Trump’s visit to KSA, including:

  • The Trump administration has unreservedly embraced Saudi Arabia as a key ally and is prioritizing a business-first approach to its relationship with the country.
  • Technology – and particularly AI – figured prominently in the visit and will continue to lead as the latest frontier for bilateral U.S.-Saudi cooperation. As of now, investments point to Saudi Arabia binding its AI future away from China and to the U.S.
  • Diplomacy was not a significant public feature of the Trump visit, but it still emphasized the increasingly central regional and global role that Saudi Arabia is playing in politics.

Key Takeaways

The Trump administration has unreservedly embraced Saudi Arabia as a key ally and is prioritizing a business-first approach to its relationship with the country.

While Saudi Arabia has long been a U.S. partner, previous administrations have had reservations — rooted in security concerns — about supporting the country’s ambitions in certain strategic areas such as AI and nuclear energy. In contrast, the Trump administration’s high-profile cooperation with the Kingdom across these areas — including involvement from high-profile U.S. companies — serves as a green light to the broader American private sector that the country is
open for business, with little to no strings attached.

While American executives have previously boycotted Saudi conferences such as the Future Investment Initiative, the large contingent of CEOs accompanying the President during his visit — including Jensen Huang (NVIDIA), Ruth Porat (Alphabet and Google), and Larry Fink (BlackRock) — indicates that concerns about reputational backlash for doing business in KSA are a thing of the past. In fact, the message appeared to be that if companies are not already operating in the Kingdom or considering doing so, they risk being left behind in the fast-growing market. Identifying and capturing opportunities in Saudi Arabia, and navigating its complex stakeholder landscape, will require local expertise, sustained attention, and regular follow-up on the ground.

Technology –— and particularly AI — figured prominently in the visit and will continue to lead as the latest frontier for bilateral U.S.-Saudi cooperation. As of now, investments point to Saudi Arabia binding its AI future away from China and to the U.S.

AI has quickly become the dominant nexus for the U.S.’ geopolitical and economic competition with China, and the most prominent battleground is the Gulf states — namely, Saudi Arabia and the UAE. Both countries have invested heavily in AI infrastructure and leading firms to position themselves as global leaders in the field. To this end, President Trump’s visit to Saudi Arabia coincided with two key developments: 1) the Trump administration’s reversal of Biden’s AI diffusion rule, which placed limits on the distribution of American AI technology to prevent it from being accessed by adversaries, notably China; and 2) the launch of HUMAIN, a PIF-owned company that will operate and invest across the AI value chain.

During President Trump’s visit, several large AI deals were announced at the Saudi-U.S. Investment Forum by leading American firms, including Nvidia, AMD, and AWS. Until these deals, the greatest constraint on the ability of KSA to execute its AI ambitions was access to large volumes of advanced chips to train sophisticated models. While other constraints remain — including the widespread availability of local talent and pushback from hawks in the Trump Administration who remain concerned about lack of guardrails to protect the technology from China — the deals pave the way for the Kingdom to build its AI ecosystem faster and at greater scale than ever before. The close involvement of leading U.S. technology executives during this visit is indicative of the central role that American firms are positioned to play in the growth of regional AI capabilities. The numerous American deals with HUMAIN may also hint at Saudi
Arabia’s strategic realignment away from China and more firmly toward the U.S. camp. This contrasts with a previously announced PIF-backed technology company, Alat, which has several investments and partnerships with China (though the Alat CEO said last year that if the U.S. asked them to cut ties with China, they would. These comments were not supported by any official KSA policy or statements, however).

While the widely publicized technology deals make for impressive headlines, fewer details are available about their actual implementation. Furthermore, the fiscal picture in Saudi Arabia – including low oil prices, budget cuts, and increased borrowing – adds further doubt to how realistic these commitments are. Even companies involved in deals announced this month will need to engage in sustained follow-up with partners in the Kingdom and continue investing in personal relationships to maintain momentum and ensure progress on their planned collaborations. Tech firms seeking to leverage opportunities in the Kingdom’s AI ecosystem should follow the implementation of these deals closely to learn from the experiences of more seasoned companies in this space. They should especially consider what they have to offer to capture the attention of local stakeholders, particularly as competition grows rapidly in the sector. Early movers are likely to have an advantage.

It is also important to note that U.S. policy may shift in the future in certain scenarios, including President Trump reversing course, the Democrats winning the midterm elections, or if it comes to light that China is accessing American AI chips in Saudi Arabia. Despite these shifts, it may be difficult to reverse some of the quickly moving AI developments from last week. Once large quantities of U.S. chips have been sent to the Kingdom, it would be counterproductive for the U.S. to try and reverse AI cooperation, as this may push the country toward Chinese cooperation.

Diplomacy was not a significant public feature of the Trump visit, but it still emphasized the increasingly central regional and global role that Saudi Arabia is playing in politics.

Officials on both the Saudi and American side preferred to let business and economic ties serve as the centerpiece of this visit. However, behind the scenes, the visit was trumpeted as a sign of Saudi Arabia’s increasingly prominent role in regional diplomacy, at times at the expense of more traditional U.S. allies such as Israel. President Trump’s effusive remarks toward the country further underlined this as he complimented Crown Prince Mohammed bin Salman, and called Riyadh, the “major business, cultural, and high-tech capital of the entire world.” In an online clip that went viral among Saudi and Arab audiences, the president portrayed Saudi Arabia as a model, describing the country’s development as “a modern miracle the Arabian way” while criticizing the “failures” of Western intervention and specifically, the policies of his predecessor, former President Biden.

During the visit, at a summit between GCC and U.S. leadership, the Crown Prince facilitated a landmark rapprochement between the U.S. and Syria, bringing President Trump and President Ahmed al-Sharaa together – the first time that leaders from both sides had met in 25 years, and concluding with a pledge to begin a lifting of U.S. sanctions. This announcement – which did not require security assurances from President al-Sharaa or a promise to recognize Israel – was another signal that President Trump is flouting American tradition and acting with his own interests in mind even if that means sidelining historic allies such as Israel.

As Saudi Arabia works with the Trump administration to negotiate deals with Iran and support regional states — including Syria and Lebanon — in their economic transitions, this may open up opportunities for foreign businesses who’d like to enter these markets. However, given President Trump’s track record of reversing sanctions policy decisions and the uncertainty around the opening of these markets, firms should remain cautious and wait before engaging in new business deals with these countries

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