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L’utilisation de la “Face Cam” dans la gestion de crise

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Lorsque la crise frappe, certains dirigeants se distinguent par leur capacité à endosser le rôle du capitaine, prêts à tout pour guider leur entreprise à travers les tempêtes. Parmi eux, Octave Klaba, le fondateur d’OVH Cloud, a opté pour une approche efficace : le “face caméra” ou “face cam”. Cette technique de communication directe via la vidéo s’est avérée être un atout considérable pour transformer sa crise en une opportunité

Le “face cam” c’est un plan en portrait face à une caméra. Qu’il s’agisse du PDG, d’un porte-parole ou d’un expert, beaucoup s’essayent à ce format pour communiquer directement avec le public pour partager des informations, des réflexions, ou des mises à jour, sans recourir à aux media traditionnels. Cette stratégie de communication de crise a été utilisée par de nombreux autres dirigeants ou hommes et femmes politiques, apportant plusieurs avantages significatifs : démentir rapidement les spéculations nocives et les fausses informations, s’affranchir du tempo des media mainstream et maîtriser le contenu du message qui sera diffusé. Dans un paysage médiatique en constante évolution où les images brutes et instantanées se partagent de plus en plus rapidement, le “face cam” s’impose comme une clé pour renforcer la résilience et la confiance.

OVH Cloud : le face cam au cœur de la stratégie de communication de crise

Lorsque l’incendie a frappé le centre de données d’OVH Cloud en 2019, Octave Klaba, fondateur de l’entreprise, s’est adressé directement au public et à toutes ses parties prenantes via une vidéo (et plusieurs ensuite) en “face cam”. En t-shirt, cerné et sans artifices, le fondateur partage des détails techniques cruciaux sur la gestion de l’incendie, explique en détail les mesures prises pour atténuer les perturbations et réaffirme l’engagement indéfectible des équipes d’OVH Cloud envers leurs clients. La communication rapide, factuelle et régulière d’Octave Klaba a permis de contourner les media traditionnels et de se positionner comme un relais d’information fiable, réduisant le risque de spéculation sur l’accident. Avec ses points quotidiens, Octave Klaba devient la meilleure source d’information et le seul responsable fiable de la gestion de cette crise, renforçant ainsi la confiance des parties prenantes. Mais ne vous méprenez pas, n’est pas Octave Klaba qui veut. Cette stratégie de communication de crise a été possible grâce à une communauté déjà existante sur les réseaux sociaux et à l’influence du PDG dans son domaine d’activité sur Twitter.

Grâce au choix de cette stratégie de communication, Octave Klaba a réussi à faire de la crise une opportunité. Malgré les antécédents de 2017 et les recommandations des pompiers n’ayant pas été suivies, cette crise a renforcé la réputation de l’entreprise en tant qu’acteur de confiance. Les conséquences financières, économiques et de réputations sont restées limitées pour le géant du cloud français. Cependant, une bonne communication de crise ne permet pas d’éviter complétement les conséquences judiciaires. 140 entreprises clientes ont décidé de mener une action collective. On peut imaginer qu’elles auraient pu être plus nombreuses si Octave Klaba n’avait pas mobilisé sa communauté comme il l’a fait.

Faire retomber la pression dans un contexte anxiogène : Delta Airlines

Souvenez-vous en 2010, et bien avant l’incendie d’OVH la panique générale avait gagnée tous les aéroports européens lors de l’éruption du volcan Eyjafjallajökull. Comme d’autres compagnies aériennes, Delta Airlines a fait face à d’importants problèmes opérationnels et à des annulations massives de vols. Pour transformer la crise en opportunité il a fallu tirer son épingle du jeu face à ses concurrents européens et internationaux. Dans un contexte extrêmement anxiogène, Richard Anderson, PDG de Delta à l’époque, s’est adressé directement au public via une vidéo expliquant en détail les mesures prises par la compagnie.

Cette démarche a permis à Delta Airlines de reprendre le contrôle de la narration de la crise et de faire baisser la pression du côté des passagers. De plus, les media ont salué cette approche comme un exemple de communication de crise efficace. Cette réception positive a renforcé l’image de Delta Airlines en tant qu’entreprise soucieuse de ses clients.

Interview de Richard Anderson à l’Aviation Summit le 12 avril 2012

La viande à l’ammoniaque et l’armada d’experts de Mc Donalds

Qui ne s’est jamais demandé ce qu’il pouvait y avoir dans un burger ultra-transformé chez Mc Donald’s ? Lavage des parties grasses de la viande de bœuf avec de l’ammoniaque, morceaux de plastique dans le poulet, broyage des poussins dans les nuggets, pastille anti-vomitive, autant de théories dont le fast-food le plus connu du monde fait régulièrement les frais.  

Le roi du burger a choisi de taper fort : mobiliser des experts en face-caméra expliquant en détail les procédures de fabrication. Quand on sait que les « experts » ont un coefficient de confiance encore plus élevé que le dirigeant d’entreprise, cela semble être une idée de génie ! Surtout lorsque l’on sait que les campagnes marketing sont souvent bien loin de la réalité des usines de l’agroalimentaire.  Ajoutez à cela la dimension hautement émotionnelle de l’alimentation – nous sommes ce que nous mangeons – et c’est un cocktail explosif !

Les vidéos tentent d’expliquer de manière pédagogique le processus de fabrication « de la ferme au restaurant ». Avec ces vidéos, Mc Donald’s s’affranchi d’un énième reportage télévisé sur « les coulisses du géant du burger » et maîtrise ce qu’il souhaite montrer de son processus de production et se met dans une posture d’ultra-transparence.

Les limites de l’exercice

Malgré ses avantages, le “face cam” n’est pas une solution miracle.

Le choix de la personne qui apparaît en “face cam” est crucial. Que ce soit le PDG de l’entreprise, un porte-parole expérimenté ou un employé dévoué, cette personne doit incarner le message. Le succès du “face cam” repose largement sur la capacité de cette personne à transmettre un message clair et assuré.

En parallèle, le choix de la plateforme de diffusion et du compte associé est également décisif. Sélectionner une plateforme inappropriée peut s’avérer inutile, voire pire, allumer le feu là où il n’est pas. C’est en voulant s’essayer au face cam qu’en 2017 United Airlines à créer un bad buzz sur Facebook. Des vidéos d’une évacuation musclée d’un passager jugée disproportionnée ont été largement diffusées sur Twitter. La cause ? Le passager avait été tiré au sort pour céder sa place à un membre d’équipage d’une compagnie partenaire. Médecin, il s’était opposé en raison de rendez-vous médicaux qu’il devait assurer. Après ce scandale, le PDG a pris la parole en Facebook Live. La publication a été perçue comme inappropriée et a été submergée de commentaires négatifs en temps réel, allumant le feu sur une autre plateforme en manquant sa cible initiale.

Le face cam c’est donner l’impression que l’on s’exprime en toute spontanéité à une communauté, sans montages et sans intermédiaires. C’est répondre à la demande d’images de plus en plus « brutes » des internautes et des communautés. Cependant, malgré l’image qu’elle donne, cette pratique nécessite une bonne préparation, plusieurs répétitions et le bon porte-parole. Selon la gravité de la crise, le face cam ne doit pas être une solution miracle. Une apparence trop décontractée face à une situation perçue comme très grave peut également se retourner contre l’entreprise.

Trois grands conseils si vous souhaitez vous tenter à l’exercice : média-trainer le porte-parole, choisissez avec soin vos objectifs de communication au regarde de vos réels enjeux et effectuez un mapping précis des conversations sur les réseaux sociaux pour ne pas se tromper de cible ou de canal.